LE LIVRE DU MOIS : mai 2015 |
Non Lieu, 2015 Oeuvres en français Sous le signe de Cyber-Cybèle
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Nina Živančević SONNETS EN AVION Traduit du serbe par Ljiljana Huibner-Fuzellier et Raymond Fuzellier Présentation de l'éditeur
La poésie de Nina Živančević procède de deux influences majeures: le surréalisme, et plus particulièrement le mouvement surréaliste serbe, d'une part, la beat generation dont elle fréquenta les auteurs, d'autre part. A cela s'ajoute un souffle lyrique slave, qui imprègne chacun de ses poèmes d'une sensualité exacerbée.
Préface de Jean-Pierre Faye Don à Nina Pour Nina Živančević – j’écris les mots qui désignent et décrivent ce qui ne peut être description, et que je nommerai la nonchalance ardente – de ses poèmes, ou leur empressement retardé, retenu, rapproché. Qualité mystérieuse, qui irrigue sa substance de poésie. C’est cela, la poésie et la poétique de Nina Živančević. Qui transparait, quelle que soit la langue adoptée par son chemin de poème. En langue anglaise, ou en langue française, et bien sûr aussi dans les langues slaves, – quand je l’entends, dans ces langues qui sont les siennes et que j’ai voulu approcher plus près, sans jamais les atteindre vraiment. Et la grande amitié de poésie qui me relie a Nina Živančević traverse avec une joie grandissante ce paysage continuel et pourtant en variation perpétuelle, de sa nonchalance ardente. C’est là comme si un paysage entier se trouvait soudain en danger. Car le « paysage yougoslave » pour moi demeure marqué par ces jours terribles de la fin d’hiver, en février-mars 1943. Où j’entendais se déchainer un coup de poing contre les nations slaves du Sud de l’Europe, alors groupées sous le beau nom finalement victorieux de Yougoslavie, qui va être plus tard « autodétruit »… Mais qui permettra justement leur résistance splendide, durant l’hiver et le printemps de guerre en l’an 1943 d’un siècle. Aujourd’hui huit Républiques affrontées entre elles ont succédé a la « République Fédérative Yougoslave », la Republika Federativna qui siégeait aux réunions de Bandung, aux côtés de la Chine et de l’Indonésie, parmi les puissances « non-alignées ». – Mais les poèmes de Nina surviennent, parmi le chant des poèmes du monde de la vie : ils acquiescent à ce qui vient, à l’échelle des minutes brèves du plus vivant, « par bonheur ». – Avec cet humour pas du tout défini, de l’accablement infatigable, et triomphant. Ces instants de poèmes viennent au-devant du plus vivant. Ce sont ceux de Nina. De Nina Živančević, les merveilleux. |
Dessin de Nathalie Perrault |
Lors d'un passage dans le métro parisien Je l'ai vue Tout habillée de soie et De velours tandis qu'elle se penchait pour Ramasser un centime qui s'était échappé De son porte-monnaie, elle n'a Même pas jeté un coup d'œil sur la mendiante qui avait Un nouveau-né dans les bras À deux pas en face d'elle Pour la pauvresse j'ai laissé tomber Un euro dans un gobelet Même si elle a de quoi manger il lui faut rester là Assise pour un métier aussi dégradant Et voilà, tandis que je m'efforce de Noter pour moi une impression pesante L'enfant glisse sa main dans mon sac Il ne se doute pas Que je suis native de Dortchol (1) Je suis triste et je le laisse Ainsi farfouiller dans le sac Bientôt je vais me mettre à pousser des cris aigus Bientôt il va comprendre à qui Il a affaire Bientôt je vais Entonner « Je suis née un jour De Pâques (2)… » Pour le rappeler à l'ordre… (1) Dortchol : quartier situé au nord de la vieille ville de Belgrade, au bord du Danube. (2) Chanson populaire serbe. Une jeune femme dit que, nourrie par sa mère de lait et de vin rouge, elle est grande et svelte, blanche de teint et a les joues roses. |
Nina Živančević |
Auteur : Nina Živančević L’Œuvre et l’itinéraire de Nina Živančević expriment une qualité que l’on peut dire cosmopolite. Yougoslave, d’origine, elle a longtemps partagé son existence entre New York et Paris où elle a fini par s’installer. Son parcours poétique s’est inspiré des influences les plus variées et les plus fructueuses de chacun de ces pays. Nina Živančević a fait partie du comité éditorial de nombreuses revues littéraires : Delo, Književne novine, New York Arts Magazine, Modern Painters, American Book Review, East Village Eye et La République de lettres. Aujourd’hui, elle fait partie du comité éditorial de la revue Au sud de l’Est. Nina Živančević a publié une douzaine de recueils de poésie, pour la plupart en langue serbe, mais aussi en anglais. Trois de ses recueils ont été traduits en français et publiés aux éditions L’Harmattan : Sous le signe de Cyber-Cybèle, J’ai été journaliste de guerre en Egypte et L’Amour n’est qu’un mot. L’ensemble de son œuvre a été largement diffusé sous forme d’émissions radiophoniques à Belgrade, Londres et Paris. Source : éditeur
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