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> Miodrag Pavlović <

 
 
 
 
 
 


II


LA POÉSIE CONTEMPORAINE    

 

 



 MIODRAG  PAVLOVIĆ

 Quatre poèmes


* * *

Je me réveille

dessus un lit de tempêtes


Les cerises mûres tombent

dans la boue

Dans une barque

appellent à l'aide

des femmes échevelées

Un tourbillon

d'ongles maléfiques

étrangle les morts

Bientôt

de tout cela

on ne saura rien.

                               (87 poèmes, 1952)



Sur la mort d'une poule

[На смрт једне коке]

Une poule attachée par une patte

pend d'un nuage

sans tête

Du sang dans la cuvette des toilettes


Une main près d'une main

deux couteaux

jouent sur un piano

Le plumage d'un oreiller

pardonnera

à nos cous sans plumes.

                 (87 poèmes, 1952)



Le prince décapité se souvient

[посечен кнез се сећа ]

Contre mon resplendissant cilice

s'est ruée la cavalerie asiatique

telle une avalanche de sable.

De la colline le peuple a vu

la lame sur mon cou

et après elle, un pigeon en vol.

Décapité je fus,

le pigeon se planta dans ma gorge,

des épaules de l'église le sang coulait.

Les cloches ont carillonné de par les mers atlantiques,

on porta ma tête

au sud et au nord,

de la pointe des lances au dômes des coupoles.

D'autres la cherchaient en suivant les étoiles

comme si elle était une île

et la trouvaient dans les sources

où avec l'eau gargouillent les paroles natives.

Courageusement j'ai enduré la mort

mais en quoi est-ce une vertu ?

Mon cou resta,

souche desséchée dans un champ.

Annonciateur, m'avait-on dit,

mais par la mort j'ai devancé ma parole,

est-ce une vertu que ceci :

avec des mots inexprimés

du beau côté de la souffrance s'en aller ?

                               (La Grande Scythie, 1969)



Lamento pour smederevo[1]

[Оплакивање смедерева]

Nous restâmes sans ville et sans loi,

la ville est tombée.

Nous ne savons où commence notre pays,

et partout sont ses limites.

Les murailles avec nos noms tombèrent,

la rivière les a emportées.

Armés et voyageurs passent par-dessus nous,

personne pour venir à nous.

Il n'y aura plus de belles villes

sur notre terre.

De longues nuits nous désirons et des forêts profondes

où l'on peut voir même sans yeux.

Que nous puissions chanter et de nous-mêmes
                                                                    nous souvenir,

les autres nous ont oubliés...

                                             (La Grande Scythie, 1969)

[1] En 1459, les Turcs conquièrent la ville de Smederevo, capitale du Despotat de Serbie. Cet évènement marque la fin de l'État serbe médiéval et le début de l'occupation ottomane de la Serbie qui a duré jusqu'à la Première insurrection serbe de 1804.


Poèmes traduits par
Vladimir André Cejovic et Anne Renoue

 
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