Saša Radonjić
II
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LE POÈME DU MOIS : JANVIER 2018 |
SAŠA RADONJIĆ (1964)
LE MIROIR CONCAVE
Je regarde l’homme inconnu Dans le miroir de la librairie Il retire lentement Mon livre de l’étagère
Je l’écoute à la dérobée Alors qu’il lit à son ami Quelques vers D’une voix feutrée
Je remarque que son menton Soudain s’épaissit Qu’il rapetisse d’une dizaine de centimètres Puis que son nez se transforme L’expression sereine du beau visage s’efface Et cet homme devient quelqu’un comme moi Mais en bien plus vrai
Traduit du serbe par Boris Lazić
САША РАДОЊИЋ
КОНКАВНО ОГЛЕДАЛО
у огледалу књижаре посматрам непознатог човека што успореним покретом узима са полице моју књигу
слушам га кришом док полугласно чита свом пријатељу неколико стихова
примећујем како му изненада нараста брада како се смањује за десетак центиметара преобликује му се нос нестаје ведрине са лепог лица и тај човек постаје неко као ја само много стварнији
In : Тетовирања анђела, Микро студио Хобит, Нови Сад, 2016.
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LAZA KOSTIĆ
(1841-1910)
PARMI LE REVE ET LE REVEIL
O mon cœur abandonné,
qui t’appela devant mon seuil ?
fileuse de rêves sans fin
toi qui files des fils tant fins
parmi le rêve et le réveil.
O mon cœur encor fou,
que fais-tu de fils pareils ?
telle la fileuse tranquille*,
ce que jour file, nuit effile,
parmi le rêve et le réveil.
O mon cœur courroucé,
évite-moi ce dur écueil !
car alors comment se fait-il
que je te perds dans tous ces fils
parmi le rêve et le réveil !
* En original : Pletilja stara, Fileuse ancienne. Le poète fait allusion à Pénélope. [N.d.T.]
Traduit du serbe par Kolja Mićević
In Les Saluts slaves, Editions « Kolja Mićević », Paris-Belleville, 2002, p. 80.