Petar Kočić vu par ses confrères

Jovan Dučić,  Pero Slijepčević et Ivo Andrić

 

 

Kocic N NIETZSCHE


« Il avait davantage l’air d’un insurgé que d’un écrivain bosniaque, d’un homme fait plus pour le duel que pour la méditation, plus habile à manier la kubura[1] que la plume. Personne ne s’attendait à voir Kočić un jour bouleverser la nouvelle serbe mais, plutôt, soulever les paysans et incendier les çardaks[2] turcs. Toute sa personne laissait deviner un combattant, un homme belliqueux. Sa haute stature était toute entière faite de gaucherie, à l’instar de qui sait parfaitement se tenir en selle mais est incapable de marcher sur un trottoir. Il avait les bras aussi longs que ceux d’un sonneur de cloches, les yeux écarquillés, effarés d’un chasseur de lions et non de lapins ou de perdrix. Et une voix qui claironnait plus qu’elle ne prononçait de mots humains. »

Jovan Dučić, “Petar Kočić”, Moji saputnici [Mes compagnons de route], Sarajevo, 1969, p.35. Traduit par Alain Cappon.

*

« Forte corpulence, grands yeux, longues baccantes. C’est un colosse de haïdouk sorti hier des forêts bosniaques, se vêtir à l’européenne l’engonce et lui est mal seyant. Sur son haut front plat, comme sur un rivage, blanchoie la vague aérienne des clairières. Quand il prend la parole, c’est la montagne qu’on croirait entendre parler derrière lui. »


Pero Slijepčević,
cité d’après : I. Andrić, « La terre, les hommes, et la langue chez Petar Kočić ». Traduit par Alain Cappon.

*

« Je suis tombé, il y a quelques temps, sur une photographie fidèle et bien reproduite de Petar Kočić. Je l’ai observée longtemps. Elle me rappelait le visage de quelqu’un d’autre que j’avais vu aussi sur une photo, mais je ne savais plus qui. – A qui, mais à qui donc, cela me fait-il penser ? – me demandais-je à plusieurs reprises, et puis brusquement cela me revint : à la photo de Friedrich Nietzsche. Je ne saurais dire ce qui avait provoqué en moi ce rapprochement. Les cheveux ? La moustache ? Le regard ? La tenue ? Peut-être rien de tout cela. Peut-être chacune de ces choses en particulier ou, peut-être, toutes à la fois. »


Ivo Andrić, Signes au bord du chemin, traduit du serbe par Harita Wybrands, Editions L’Age d’homme, 1997, p. 182-183.




[1] sorte de pistolet.

[2] Çardak, mot turc : sorte de maison.

 

Date de publication : décembre 2015

Date de publication : septembre 2016

> DOSSIER SPÉCIAL : PETAR KOČIĆ

Date de publication : juillet 2014

 

> DOSSIER SPÉCIAL : la Grande Guerre
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Le poème titré "Salut à la Serbie", écrit en janvier 1916, fut lu par son auteur Jean Richepin (1849-1926) lors de la manifestation pro-serbe des alliés, organisée le 27 janvier 1916 (jour de la Fête nationale serbe de Saint-Sava), dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne. A cette manifestation assistèrent, â côté de 3000 personnes, Raymond Poincaré et des ambassadeurs et/ou représentants des pays alliés.

Grace à l’amabilité de Mme Sigolène Franchet d’Espèrey-Vujić, propriétaire de l’original manuscrit de ce poème faisant partie de sa collection personnelle, Serbica est en mesure de présenter à ses lecteurs également la photographie de la première page du manuscrit du "Salut à la Serbie".

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