LE LIVRE DU MOIS : OCTOBRE 2017 |
Phébus 2001 290 pages
|
Svetlana Velmar-Janković LE PAYS DE NULLE PART Nigdina Traduit par Alain Cappon Présentation de l'éditeur Belgrade, 1999. Velja rentre à New York où il exerce la profession de psychiatre. Il vient de rendre visite à sa sœur Marija, restée en Serbie au long de ces dix ans de guerre. Il quitte un pays dévasté, livré toujours aux anciens fantômes. Mais ce n'est pas seulement la Serbie qui a été bombardée, meurtrie, c'est toute la violence d'une époque qui semble s'être concentrée dans ce lieu – et dans l'âme de ceux qui l'habitent. Marija cependant confie à son journal intime les inquiétudes d'une vie fourvoyée. Communiste sincère, elle a dû ravaler bien des illusions. La description du quotidien vécu – si peu vécu – par cette femme à l'heure où pleuvaient les bombes pèse moins, finalement, que les rêves qui lui font escorte... lesquels ne sont pas loin de prolonger ceux de sa mère qui n'est plus, sa mère sacrifiée pour rien. A moins que le souvenir en nous de ceux qui sont partis ne soit, justement, la seule force capable de nous retenir face à la tentation du néant... Velja et Marija – dont on apprendra qu'ils sont les enfants de Milica (la vieille dame indigne de Dans le noir) - cherchent à se rejoindre, non sans peine, par-delà le temps et l'espace, entravés sans doute eux aussi par le sentiment obscur d'appartenir à un lieu, d'être de quelque part. Illusion des illusions par quoi nous cherchons à oublier, dans l'incompréhension, le mensonge, l'injustice, que notre condition d'humains est d'abord celle de l'exil. Et que la seule patrie où puissent jamais se rejoindre les hommes est le pays de Nulle part. Présentation du traducteur Si Le Pays de Nulle part n’est pas la suite de Dans le noir, il en est sans conteste le prolongement. De la même façon les deux ouvrages dépeignent une époque, de la même façon, quoique sous des angles différents, ils s’attaquent à la même problématique, de la même façon ils puisent leur substance pour partie dans l’autobiographie. Mais cette fois la romancière s’implique personnellement et dénonce en termes désabusés, désespérés, révoltés l’image véhiculée au plan international de son pays tenu pour rien de moins que « le siège du mal ». Par la faute d’(ir)responsables politiques qui interdirent à leur peuple toute forme de « voix au chapitre », prétexte est trouvé pour vouer la Serbie à l’anéantissement, à la disparition pure et simple dans l’indifférence feinte ou assumée des peuples et dirigeants des grandes démocraties occidentales. > Texte intégral < |
Svetlana Velmar-Janković (1933-2014)
« Je suis venue au monde l’année où Hitler s’est emparé du pouvoir », déclare Svetlana Velmar-Janković au début de son autobiographie romancée Prozraci (Transparents, 2003), ce qui – d’emblée – la pose en témoin privilégié des événements marquants de l’histoire européenne, yougoslave et serbe du XXe siècle, de l’avènement du nazisme aux premiers pas de la Serbie démocratique après la guerre dite « du Kosovo » et la chute du régime de Slobodan Milošević. L’œuvre de cette femme de lettres se caractérise en premier lieu par sa grande diversité. Romancière, nouvelliste, auteur d’ouvrages historiques, de pièces dramatiques et de livres pour enfants, Svetlana Velmar-Janković s’est attaquée avec un égal talent aux formes d’écriture les plus variées. Trois de ses romans, disponibles en traduction française, méritent d’être évoqués en particulier : d’abord, bien sûr, Dans le noir (1997) qui dépeint la descente aux enfers de la famille Pavlović après la prise du pouvoir par les nouvelles autorités communistes ; Le Pays de Nulle part (2001) qui fait de Marija et Velja Pavlović les personnages centraux mais, sans être une suite de Dans le noir, présente une autre page de l’histoire dramatique de la Serbie : la crise du Kosovo et les bombardements effectués par l’OTAN en 1999 ; et, enfin, L’Abîme (2004) qui retrace l’accession au pouvoir du prince Mihailo et les premiers pas d’une Serbie sur la voie de l’émancipation du joug turc. > Texte intégral < |
> Tous les mois < |