Ana Vujović

Université de Belgrade / Faculté de formation des maîtres

 

Un aspect des relations fanco-serbes :

L’Association de coopération culturelle Serbie-France

 

Velmar Jankovic S portrait 1

 Ana Vujović, Srpsko-francuska susretanja, 2011


Résumé : En retraçant l’histoire de l’Association de coopération culturelle Serbie-France, de ses débuts en 1904 jusqu’à l’époque contemporaine, l’auteure se propose de montrer le développement de ces relations, qui ont connu leur apogée dans l’entre-deux-guerres. L’influence de la France s’est manifestée et s’exprime toujours dans tous les domaines de la vie sociale – politique, sciences, culture, éducation, économie. Aux liens amicaux indéfectibles, nés pendant la Grande Guerre, s’ajoutaient des intérêts politiques, économiques et militaires qui, très souvent, n’étaient pas opposés. Même à l’époque des divergences dans les relations politiques entre les deux pays vers la fin du XXe siècle, la coopération culturelle et les échanges scientifiques se poursuivirent, soutenus par les actions de l’Association de coopération culturelle Serbie-France : colloques, expositions, publications, événements sportifs, conférences d’éminents professionnels et professeurs universitaires français et serbes. L'Association a élargi le domaine de ses activités qui englobe à présent la coopération culturelle avec tous les pays où la langue française est pratiquée et la participation aux Journées de la francophonie à l'Institut français de Serbie. Ses activités passées et présentes donnent à penser qu'il y a lieu de croire à la possibilité de tracer aussi de nouvelles voies de coopération.

Mots-clés : coopération, culture, Serbie, France, association.

 

Un bref aperçu historique

La richesse des rapports et de la coopération entre la Serbie et la France, deux pays qui ne sont pas proches du point de vue géographique, mais qui ont presque toujours entretenu de bonnes relations, ne cesse de progresser. Nous savons que les amitiés traditionnelles entre les nations reposent dans la plupart des cas sur une communauté d’intérêts, qu’ils soient politiques, économiques ou géopolitiques. La France est l’un des pays dont les intérêts ont souvent été liés à ceux de la Serbie, ce qui peut expliquer la quasi absence de conflits ouverts pendant cette longue histoire de contacts. Les relations francoserbes sont complexes, leur origine remonte à la période la plus reculée, avant même la création du premier État serbe, et ce phénomène est d’ordre historique, politique, économique, socioculturel, linguistique et affectif[1].

Les libertés politiques françaises en général et les idées politiques en particulier ont profondément influencé le développement de la Serbie tout au long du XIXe et au début du XXe siècles. Pendant cette période, les rapports francoserbes furent marqués par une forte liaison économique et témoignent des rivalités économiques et politiques entre la France, l’Allemagne et l’AutricheHongrie dans les Balkans. À partir des années 1840, de nombreux jeunes intellectuels et artistes serbes vinrent en France pour se former et, à leur retour, une nouvelle impulsion fut donnée à l’adoption de la langue et de la culture françaises : ils parlaient français couramment, diffusaient leurs connaissances à travers les métiers qu'ils exerçaient et les livres de leurs bibliothèques privées étaient lus ou traduits. Ils occupaient des postes importants dans l’administration, l’éducation ou les cabinets ministériels, fondaient différentes associations et lancaient des revues. On les appelait les « Parisiens », ils étaient porteurs des idées révolutionnaires et libérales, de la langue et de la culture françaises, et ils représentaient les meilleurs médiateurs entre les deux pays et les deux cultures. L’établissement du premier Consulat français en 1838 à Belgrade accentua la présence des Français et le nombre de publications en langue française.

Les deux dynasties serbes étaient francophones, celle des Karađorđević particulièrement francophile car le roi Pierre Ier Karađorđević avait vécu et acquis son éducation militaire en France (il avait même participé à la guerre contre la Prusse en 1871). C’est pourquoi au début du XXe siècle les relations politiques, pourtant déjà satisfaisantes, prirent une tournure amicale, de sorte que fut fondée à Belgrade une société littéraire française, annonciatrice d’autres du même ordre. Cette association, après avoir changé de nom, existe encore aujourd'hui et a pour but de contribuer au développement des relations culturelles entre la Serbie et la France et au rayonnement de la langue française.

Elle fut officiellement fondée en 1904 mais la correspondance diplomatique française montre que dès 1891, l’initiative avait été prise de créer un cercle français à Belgrade puis à Niš. On a conservé les règles de fonctionnement du Club français fondé à Belgrade en 1903 ; dirigé par Slavka M. H. Antonović, il avait une école de langue française et une salle de lecture où les membres se rencontraient, lisaient la presse ou discutaient en français. On envisageait aussi l’organisation de conférences publiques et de soirées ; que le président honorifique en était Milutin Nešić, secrétaire au ministère des Affaires étrangères du Royaume de Serbie, prouve l’importance et la renommée du Club dans la société serbe de l’époque.

On connaît également l’existence de la Réunion française de Belgrade composée de Français résidant dans la capitale serbe et d’une quarantaine de Serbes. Son rôle était plus significatif et avait pour objectif de promouvoir la langue et la culture françaises, mais surtout de résister à l’influence grandissante des pays germanophones. Elle recevait un soutien financier du gouvernement français, ce qui permettait l’acquisition de journaux et revues français, Le Temps, Le Matin, Le Journal, Le Journal des Débats, L’Illustration, La Revue des Deux Mondes, La Revue hebdomadaire etc. Grâce à l’aide des journalistes du Journal des Débats, du Temps et de L’Écho de Paris, et aussi celle de diplomates français, l’école des Sciences Politiques de Paris la soutenait également. Les membres (d’origines française et serbe) étaient de plus en plus nombreux et, à partir de 1907, la Réunion française de Belgrade élargit son action à plusieurs villes de province (Kragujevac, Ćuprija, Aleksinac, Kruševac).


Entre 1911 et 1914, il existait une troisième association culturelle franco-serbe intitulée Société littéraire de Belgrade, dont le comité directeur était composé des plus hautes personnalités serbes de l’époque, et parmi les membres fondateurs figuraient le roi Pierre Ier et le ministre plénipotentiaire de France à Belgrade
[2]. Après la fondation d’une bibliothèque avec salle de lecture, elle organisa des conférences données par des personnes de renom, des cours gratuits de français, des expositions artistiques, accorda des bourses pour les cours d’été à l’Alliance Française, décerna des prix pour les meilleures traductions de la langue française, favorisa la coopération entre les institutions artistiques et scientifiques. L’influence des « Parisiens » s’avéra prépondérante, surtout pour la promotion de la langue et de la culture françaises, ainsi que pour la création des sociétés littéraires à Šabac, Niš et Valjevo.


La fondation de ces sociétés et clubs français dans les premières années du XXe siècle aura créé les conditions idéales à l’épanouissement de l’influence française tant culturelle qu’économique et politique. D’où la préoccupation des diplomates allemands de voir les intellectuels serbes tellement séduits par la culture française. La même période fut marquée par la fondation de sociétés franco-serbes en France et par la volonté de lancer à Paris une revue slave qui contribuerait à une meilleure connaissance des peuples slaves en Europe.

Cette coopération franco-serbe prit la forme d'une alliance pendant la Première Guerre mondiale ;  pour le peuple serbe, elle représentait le point culminant de l’amitié entre les deux pays. Cette alliance entre la Serbie et la France était atypique, car elle reposait sur une identité de valeurs et pas uniquement sur des concessions politiques et territoriales. Dans les luttes menées côte à côte contre les mêmes ennemis se forgèrent des liens très solides et l’accueil généreux en France de jeunes Serbes représenta pour tout un peuple la preuve ultime et la plus touchante d’une amitié particulière. Et ces jeunes, de retour au pays après la guerre, propagèrent la francophilie et la francophonie, transmettant à leur postérité les émotions les plus profondes envers ce pays amical qui, entre les deux guerres, compta presque 30 000 étudiants serbes, dont de nombreux boursiers du gouvernement français.

Nul doute que l’entre-deux-guerres fut l’époque la plus illustre dans toute l’histoire des relations entre la France et la Serbie et qu’il correspond à l’apogée des rapports francoserbes et yougoslaves. L’influence de la France s’était manifestée dans tous les aspects de la vie sociale – politique, économie, industrie, sciences, culture et éducation. Aux sentiments amicaux s’ajoutaient des intérêts politiques, économiques et militaires communs. Sur la base de ce sentiment très fort de gratitude, on organisa à Belgrade en 1925 « Francuski dan » (« La Journée française »). L’année suivante s'ouvrit dans la capitale yougoslave l’école franco-serbe Saint-Joseph, puis l’Institut d’études françaises et, en 1930, on érigea un monument à la France orné de cette inscription: « À la France – Aimons la France comme elle nous a aimés ». Ensuite, on édifia à Paris les monuments consacrés aux rois Pierre et Alexandre Karađorđević, deux fidèles amis de la France, le second perdant malheureusement la vie lors de l'attentat perpétré à Marseille en 1934.

Changeant une fois de plus de nom, à partir de 1920 l'association s’appella la Société des Amis de la France et son premier président est, comme avant la Grande Guerre, le célèbre savant Jovan Žujović, président de l’Académie royale serbe. Les années de lutte commune et de collaboration amicale, ainsi que la politique extérieure des deux pays eurent une très grande répercussion sur les activités de l’Association et sur l’intérêt que le côté français lui portait. Parmi ses membres figuraient toujours un certain nombre de Français résidant à Belgrade et le ministre plénipotentiaire de France en Yougoslavie assistait souvent à ses réunions. Déjà à cette époque de nombreux cercles des amis de la France existaient en province : Kragujevac, Požarevac, Valjevo, Niš, Leskovac, Veliki Bečkerek, Šabac. D’autres furent fondés plus tard dans plusieurs villes : Subotica, Vranje, Vršac, Užice, Čačak, Niš, Smederevska Palanka, Kikinda, Stari Bečej, Senta, Sremska Mitrovica, Jagodina, Kraljevo, Negotin, Zaječar, Sremski Karlovci, Sombor[3].  En plus de ses activités habituelles, elle publia pendant cette période l'ouvrage de Grgur Jakšić Francuska i Jugoslavija u prošlosti [La France et la Yougoslavie dans le passé], le tiré à part d'un ouvrage collectif (1938) et Knjiga o Francuskoј [Livre sur la France, 1940] composé de textes écrits par d’éminents intellectuels serbes. Bien que l’enseignement de la langue française ne fît pas partie du programme régulier des écoles élémentaires, à l’initiative de l’Association et sous son organisation, le ministre de l’Éducation autorisa en 1930, les cours de langue française dans certains lycées professionnels et écoles élémentaires.

Après la Deuxième Guerre mondiale, dans une atmosphère politique et sociale totalement différente, l’Association poursuivra son activité, cette fois sous le nom d’Association de coopération culturelle Yougoslavie-France. Elle prolongera sa mission en mettant l’accent sur la coopération avec les intellectuels français de gauche, de nombreuses personnalités de la vie culturelle et politique se succédant à sa tête dont les plus connues sont sans doute les écrivains Dušan Matić (de 1957 à 1980) et Mira Alečković (de 1980 à 1991). Parmi les membres du Comité directeur figurèrent des personnalités (voire des célébrités de la vie culturelle, preuve de l’importance de la culture française et de la renommée de l’Association) tels Desanka Maksimović, Ivo Andrić, Isidora Sekulić, Petar Lubarda, Marko Ristić, Milan Dedinac, Veljko Petrović, Stevan Hristić, Risto Stijović, Marko Čelebonović, Vladislav Ribnikar, Vasko Popa (en tant que secrétaire), Mira Trailović. On poursuivit l’organisation de conférences, l’accueil d’éminents représentants de la culture française et la collaboration avec la société sœur à Paris[4]. On programmait des concours pour les lycéens, un séjour en France, et des livres étaient décernés aux meilleurs d'entre eux. En collaboration avec l’Association France-Yougoslavie à Paris et avec les lecteurs de langue serbo-croate[5] des universités de Paris, Strasbourg, Lyon, Dijon, Bordeaux, Clermont-Ferrand et de l’École nationale des langues orientales, dès 1959 et pendant plus d’une décennie, l’Association Yougoslavie-France organisa des concours pour les étudiants français inscrits aux cours de langues slaves des facultés des lettres en France (répondant à ceux que l’Alliance Française organisait pour les lycéens en Yougoslavie). Les candidats devaient rédiger un article sur la Yougoslavie ou sur un ouvrage yougoslave (ses écrivains et leurs œuvres, les beautés du pays, l’importance des langues étrangères, les spécificités du serbo-croate etc.), les prix attribués aux lauréats étaient trois voyages en Yougoslavie et plusieurs livres. Il est intéressant de souligner que le jury était composé d’éminents membres du Comité directeur de l’Association, dont la plupart étaient des écrivains et poètes connus : Dušan Matić, Desanka Maksimović, Mira Alečković, Miodrag Ibrovac et Dušan Milačić.

Dans les années 1960, 1970 et 1980 existait en fait une fédération des associations qui fonctionnait dans toutes les capitales des républiques yougoslaves, ainsi que dans plusieurs villes (Novi Sad, Niš, Split, etc.). Le centre de cette fédération était à Belgrade et les assemblées des représentants de toutes les associations s'y tenaient régulièrement. Les rapports d'activités montrent que la principale source de revenu était les cours de langue française dont le nombre d’apprenants ne cessa d’augmenter pendant plusieurs décennies. Les parents étaient aussi intéressés par les jardins d’enfants (le premier ayant ouvert dans les années 1960) où les petits apprenaient le français en jouant et en préparant des spectacles. Pendant l'un d'eux donné à l’occasion du nouvel an le 30 décembre 1960, les enfants eurent le plaisir de rencontrer l’actrice Branka Veselinović et le chanteur Predrag Gojković. Malheureusement, tous les enfants ne purent pas en profiter car les locaux à la disposition de l’Association n’étaient pas suffisamment grands.

C’est à cette époque que débutèrent l’enseignement précoce du français ainsi que la formation continue des enseignants. Dans le désir de perpétuer la tradition développée entre les deux guerres à l’école Saint-Joseph et à l’Institut français, et aussi d’assurer un enseignement moderne et efficace, l’Association Yougoslavie-France initia en 1954 des cours de langue et de civilisation françaises. Les cours étaient destinés aux enfants préscolaires, aux élèves des écoles élémentaires et secondaires, et aux adultes[6]. À partir de 1993, cette école portera le nom d’Hélène d’Anjou, une princesse dont les origines étaient hongroises et françaises mais qui était devenue une reine serbe aimée et respectée dans son nouveau pays et même canonisée par l’Église orthodoxe serbe. L’École organisait aussi des cours d’été, des soirées poétiques, des projections de films, des représentations théâtrales, des compétitions et des ateliers, préparait et publiait du matériel pédagogique, assurait la formation continue pour les enseignants de français. Dans les années 1990, l’Alliance et l’École décidèrent d’élargir leurs activités aux enseignants d’autres langues par l'organisation de séminaires « Utilisation de la vidéo dans l’enseignement des langues étrangères », « Diverses ressources dans l’enseignement des langues étrangères », les deux en 1994. En 1995 débuta aussi la publication de Glossa, revue qui, destinée aux enseignants de langues étrangères, traitait de linguistique appliquée, de didactique des langues étrangères, d’enseignement de la littérature, mais qui présentait aussi des textes et le compte rendu d'événements relatifs à ces activités. Entre 1995 et 1998, parurent 11 numéros de cette revue. L’objectif était d’aider les enseignants, de présenter et de publier des méthodes et des ouvrages de référence, d'organiser des séminaires et des conférences de didacticiens éminents. Mais le manque de place pour l’école de langue devint de plus en plus criant et celle-ci fut obligée de déménager à plusieurs reprises et cessa d’exister en 2000[7].  

Les activités de l’Association à la fin du XXe et au début du XXIe siècles

En 1994 l’association changea une fois de plus de nom et devint l'Alliance Yougoslavie-France. Depuis 2002 elle porte son nom actuel et le professeur universitaire et traducteur Ivan Dimić la présidera jusqu’à son décès en 2004 ; Jelena Novaković, professeur universitaire, traducteur et grand connaisseur des relations littéraires franco-serbes, lui sucèdera. Vu la diversité de toutes ces activités, l’Association développe la coopération avec plusieurs institutions de culture serbes et françaises, avant tout avec la Bibliothèque de la ville de Belgrade, l’Institut français de Belgrade (ancien Centre culturel français), les ambassades de France et de Belgique, l’institut pour les Études du développement culturel, Wallonie-Bruxelles International (WBI), la Fondation Ilija Kolarac, le Centre culturel de Lazarevac, ainsi qu’avec l’association des Journalistes francophones serbes, l’institut de Littérature et des Arts, le Centre culturel de Serbie en France, le Centre National de la Recherche Scientifique de Paris, etc.

L’Association a célébré son centenaire d’abord à la fondation Kolarac lors d'une soirée solennelle composée d’interventions de circonstance et d’un programme littéraire et musical approprié puis, quelques mois plus tard, par un colloque sur les Relations franco-serbes, 1904-2004, qui se tint aux Archives de Serbie en octobre 2004. Une publication sous le même titre date de 2005 : réunissant 35 contributions émanant de 38 auteurs, ce volume est marqué par une diversité voulue. Ainsi, à côté des vues particulières sur l’amitié franco-serbe, on y trouve des articles consacrés aux rapports entre les deux peuples dans les domaines les plus différents : littérature, langue, Histoire, musique, histoire de l’art et arts appliqués, médecine, sciences, architecture, archéologie, économie, politique, coopération militaire[8].

Parmi les activités traditionnelles de l’Association, les plus fréquentes sont les conférences d’éminents savants serbes et français, mais aussi belges et canadiens, les présentations de publications (serbes et françaises) traitant des questions littéraires, linguistiques et didactiques autour de la langue et de la culture françaises. Pour illustrer les thématiques très diverses des publications présentées, en voici quelques-unes, avec les noms de leurs auteurs: Les mots d’origine française dans la langue serbe (Mihailo Popović), Sémantique et pragmatique des temps verbaux dans la langue française (Veran Stanojević et Tijana Ašić), Comment prendre la parole en langue étrangère (Tatjana Šotra Katunarić), Polyphonies narratives et Le fantastique et l’humour dans le procédé narratif de Marcel Aymé (Marija Džunić Drinjaković), Espace, temps, prépositions (Tijana Ašić), Éducation en France, Culture française contemporaine, Les rapports franco-serbes (Ana Vujović), Recherches sur le surréalisme (Jelena Novaković). On présente aussi des traductions d'œuvres d'auteurs francophones et les actes de colloques, des recueils thématiques (Les tendances dans les études romanes contemporaines), et des revues (Mélusine consacrée au surréalisme serbe, qui fut présentée aussi à Paris).

L’Association organise régulièrement des colloques et des tables rondes. S'attachant aux liens historiques et culturels entre la Serbie et la France, celle intitulée Relations franco-serbes et les intégrations européennes de novembre 2005 montra une fois encore l’appartenance de la Serbie à l’Europe. L’année suivante, l'Association en organisa une autre sur la position et le destin de la langue française en Serbie puis, en coopération avec la faculté de philologie, un colloque international sur le Surréalisme en son temps et aujourd’hui qui fut précédé de l’exposition « Autour du surréalisme. Le mur surréaliste serbe : Vane Bor et le mur surréaliste français : Max Ernst et Odilon Redon », au Centre culturel français (aujourd’hui Institut français) de Belgrade. Suivirent Les moralistes modernes (XIXe et XXe siècles) (faculté de philologie de Belgrade, 2009), L’Avant-garde : de dada au surréalisme (mai 2014, en coopération avec l’institut de Littérature et des Arts et le Musée d’Art contemporain), L’Apprentissage précoce et initial des langues étrangères dans l’enseignement primaire (octobre 2016). Organisé par l’Association de Coopération culturelle Serbie-France et l’Association pour les langues et littératures étrangères de Serbie, en coopération avec la faculté de philologie, à l’occasion du 50e anniversaire de l’introduction de l’apprentissage précoce des langues étrangères dans le système scolaire de Serbie, ce dernier colloque international s’était proposé d’étudier les questions touchant à l’enseignement/l’apprentissage des langues étrangères dans le premier degré (les classes préscolaires incluses) et dans les grandes classes du primaire.

L’Association a participé à l’organisation et à la publication des actes du colloque intitulé Les Études françaises aujourd’hui, qui eut lieu les 10 et 11 novembre 2011 et qui avait pour sujets « La représentation de l’espace dans les littératures française et francophone » et « Le français : de la forme au sens et inversement ». Les actes, sous la direction de Jelena Novaković, ont paru en 2012. Ces colloques pluridisciplinaires (littérature, linguistique et didactique) sont annuels depuis 2008 et organisés successivement par les universités de Belgrade, de Novi Sad, de Kragujevac et, depuis quelques années aussi, de Niš, avec le soutien de l’ambassade de France à Belgrade. Ils ont pour but de réunir les chercheurs, doctorants et enseignants, des Balkans et de France qui s’intéressent au français sous toutes ses formes et dans toutes ses représentations, à l’oral comme à l’écrit.

Pour commémorer les 170 ans de l’établissement des relations diplomatiques entre la Serbie et la France, l’Association de coopération culturelle Serbie-France, en coopération avec la bibliothèque de la ville de Belgrade et dans ses locaux, élabora un cycle de conférences en 2009 et 2010 et une table ronde en décembre 2012. En publiant en 2015 un volume intitulé  Les Serbes à propos des Français, les Français à propos des Serbes, seize textes fondés sur des bases scientifiques solides, l’Association aura marqué les 110 ans de sa fondation par une nouvelle contribution aux études des rapports franco-serbes tels qu’ils se seront développés au cours de l’Histoire, en rappelant la constatation toujours d'actualité du professeur Mihailo Pavlović, illustre spécialiste des relations franco-serbes auquel ce volume est consacré, qu’une telle publication « n’est qu’une possibilité de se rendre compte, grâce à une suite de considérations et d’informations utiles, de toute la complexité et de toute la richesse des rapports dont il y est question ». Ces rapports étaient surtout intenses dans la période de l'entre-deux guerres, comme le montrent les articles sur les Serbes et leur littérature dans la presse française[9].

Il convient de mentionner ici un ouvrage collectif par lequel l'Association aura rendu hommage à une autre personnalité émérite, son ancien président, le professeur Ivan Dimić, à qui sont consacrées Les Tendances dans les études romanes contemporaines (2008).

Au début du XXIe siècle, l'Association a élargi le domaine de ses activités qui englobent à présent la coopération culturelle avec tous les pays où on fait usage de la langue française (Belgique, Suisse, Canada, pays africains), la participation aux Journées de la francophonie à l'Institut français et l'établissement de relations avec Wallonie-Bruxelles International (WBI), qui a soutenu les manifestations portant sur la francophonie belge.

En mars 2015, l’Association a organisé une table ronde sur La Francophonie et le dialogue franco-serbe ainsi qu’en octobre de la même année, à l’occasion des 160 ans de la naissance du poète symboliste belge Émile Verhaeren, le colloque international Le symbolisme en son temps et aujourd’hui (en coopération avec la faculté de philologie de Belgrade), et en décembre une table ronde sur La Francophonie et la multiculturalité en coopération avec l’institut pour les Études du développement culturel. L’objectif était de présenter les aspects multiculturels de la francophonie vue des perspectives culturelle, linguistique, littéraire, artistique, historique et politique. En 2016, à l’Institut pour les études du développement culturel, une table ronde s’est penchée sur La francophonie et la création féminine avec pour but de présenter et de mettre en valeur, d'une part, les œuvres d’auteures francophones, et d'autre part la création littéraire et critique des écrivaines serbes ou d'origine serbe marquées par la francophonie. La même année, au mois de mars, s’est tenue, à l’Institut français et en coopération avec l’Association des journalistes francophones serbes, une table ronde sur La culture francophone dans les médias serbes. L’Association a aussi commémoré le 16 mars 2018, à la faculté de philologie de Belgrade et avec la collaboration de celle-ci, les 120 ans de la naissance du peintre surréaliste belge René Magritte par une journée d’études sur le thème : « Le mot et l'image : un dialogue surréaliste ».

La coopération culturelle perpétuée par l’Association traite également le domaine des sports. On a organisé, en coopération avec la Fédération serbe de Rugby, une rencontre Serbie-France. Consacré au maréchal Franchet d'Espèrey, elle s’est disputée le 7 octobre 2018, dans le cadre de la commémoration de la Première Guerre mondiale et de l’armistice.

En guise de conclusion

Parmi les Serbes, les inclinations francophones sont fondées sur un héritage historique considérable, surtout l’amitié née pendant les années terribles de la Première Guerre mondiale, une amitié qui connut des hauts et des bas mais qui est pourtant inscrite dans l’esprit du peuple serbe. Il est incontestable que ce sentiment soutient la francophonie en Serbie et lui donne un support discret et permanent. L’impact de tous les rapports entre la France et la Serbie sur le développement culturel, littéraire, éducatif, scientifique, politique, économique, militaire du peuple serbe est indubitable.

L'une des influences les plus vastes et les plus fortes s’est forgée et se perpétue toujours à travers l’enseignement de la langue française dont l’objectif était, entre autres, de former les jeunes générations dans la tradition de la culture française. Voulant promouvoir l’apprentissage du français, l’Association a pris l’initiative d’établir des contacts avec les établissements scolaires, primaires et secondaires, et de participer à leurs diverses activités (conférences, ateliers, pédagogie de projets etc.).

En examinant les débuts et le développement de l’Association de coopération culturelle Serbie-France, nous avons mis l’accent sur ses activités plus récentes et sur ses projets. Au cours de ses décennies d’existence, cette association a plusieurs fois changé de nom, mais nullement ses objectifs tournés vers la langue, la littérature et l’histoire, mais aussi vers d’autres domaines : archéologie, économie, politique, médecine, coopération militaire, peinture, sculpture, architecture, musique, etc. Notre objectif n’était pas, bien entendu, d’offrir ici un panorama complet de ces activités – une démarche qui aurait demandé beaucoup plus d’espace – mais de donner, à travers quelques informations utiles et pertinentes, un court aperçu de leur diversité dans le domaine des relations culturelles franco-serbes et de la francophonie.

 

Bibliographie et sitographie

Đurić, Ljiljana, «Alijansa Jugoslavija-Francuska i Škola francuskog jezika Jelena Anžujskaistorijat, delatnosti i težnje», Glossa 1/I, 1995, 59-60.

Petrović, Svetislav, Ibrovac, Miodrag (ur.) Knjiga o Francuskoj [Livre sur la France], Beograd, Društvo prijatelja Francuske, 1940.

Kolaković, Aleksandra, «Francusko-srpska udruženja početkom XX veka», https://www.kcns.org.rs/agora/francusko-srpska-udruzenja-pocetkom-20-veka/?lng=lat, 2018. (site consulté le 4 septembre 2018)

Novaković, Jelena (éd.), Les Études françaises aujourd’hui. La représentation de l’espace dans les littératures française et francophones. Le français : de la forme au sens et inversement. Belgrade, Université de Belgrade - faculté de philologie, association de Coopération culturelle Serbie-France, 2012.

Novaković, Jelena, « La littérature serbe dans la presse française à l’époque de l’entre-deux-guerres », Srbi o Francuzima -  Francuzi o Srbima / Les Serbes à propos des Français - Les Français à propos des Serbes (éd. Jelena Novaković et Ljubodrag Ristić), Univerzitet u Beogradu - Filološki fakultet, Društvo za kulturnu saradnju Srbija-Francuska, Beograd, 2015, pp. 21-38.

Pavlović, Mihailo, «Prilog istoriji Društva za kulturnu saradnju SrbijaFrancuska“ , Srpsko–francuski odnosi 1904–2004, ur. Mihailo Pavlović i Jelena Novaković, Društvo za kulturnu saradnju SrbijaFrancuska i Arhiv Srbije, Beograd, 2015, 1320.

Vujović, Ana, Srpsko-francuska susretanja, Beograd, Učiteljski fakultet, 2011.

Vujović, Ana, «Društva za kulturnu saradnju između Srbije i Francuske», Nasleđe 23/2012, FILUM Kragujevac, 179-193.

 

Ана Вујовић

ДРУШТВО ЗА КУЛТУРНУ САРАДЊУ СРБИЈА-ФРАНЦУСКА:
ПРОШЛОСТ, САДАШЊОСТ, БУДУЋНОСТ

Сажетак : Ауторка разматра српско-француске везе пратећи  активности Друштва за културну сарадњу Србија-Француска, првог српско-француског књижевног друштва, основаног у Београду 1904. године, у време процвата политичких односа између Србије и Француске, друштва које претхoди стварању бројних сличних друштава широм Србије. Француски утицај тада се осећао у свим аспектима друштвеног живота – у политици, науци, култури и образовању, економији. Пријатељска осећања, рођена током Првог светског рата, ојачана су политичким, економским и војним интересима који, у највећем броју случајева, нису били супротстављени. Чак и у време лошијих политичких односа у последње три деценије културна сарадња и размене научних резултата и искустава нису престале да се развијају, у великој мери потпомогнуте деловањем Друштва за културну сарадњу Србија-Француска, које одржава научне скупове, изложбе и спортске сусрете, објављује и представља књиге и зборнике радова, организује предавања француских и наших угледних стручњака и универзитетских професора. Друштво је проширило своје активности и на остале франкофоне земље, а учествује и у обележавању Дана франкофоније у Француском институту у Србији. Прошле и садашње активности уливају нам веру у могућност грађења нових путева културне сарадње између две земље.

Кључне речи: сарадња, култура, Србија, Француска, друштво.

 

NOTES

[1] Voir : Ana Vujović, Srpsko-francuska susretanja, Beograd, Učiteljski fakultet, 2011.

[2] Pour plus de détails sur les membres et le financement de toutes ces sociétés voir : Aleksandra Kolaković, Francusko-srpska udruženja početkom XX veka, https://www.kcns.org.rs/agora/francusko-srpska-udruzenja-pocetkom-20-veka/?lng=lat

[3] Voir: Ana Vujović, „Društva za kulturnu saradnju između Srbije i Francuske“, Nasleđe 23/2012, FILUM Kragujevac, 180.

[4] Voir : Mihailo Pavlović, „Prilog istoriji Društva za kulturnu saradnju SrbijaFrancuska“, Srpsko–francuski odnosi 1904–2004, ur. Mihailo Pavlović i Jelena Novaković, Društvo za kulturnu saradnju SrbijaFrancuska i Arhiv Srbije, Beograd, 13-20.

[5] Parmi ces lecteurs figurent de nombreux franco-romanistes et romanistes qui deviendront professeurs à la faculté de philologie de l’Université de Belgrade, tels Marko Papić, Pera Polovina, Radivoje Konstantinović, Branko Jelić, Nikša Stipčević.

[6] On organisait même des cours de français de spécialité, pour les pharmaciens par exemple, ce qui représente probablement les débuts de l’enseignement du français sur objectif spécifique en Serbie.

[7] Pour plus de détails voir : Ljiljana Đurić, „Alijansa Jugoslavija-Francuska i Škola francuskog jezika 'Jelena Anžujska' – istorijat, delatnosti i težnje“, Glossa 1/I, 1995, p. 59-60 ; Ana Vujović, „Društva za kulturnu saradnju između Srbije i Francuske“, Nasleđe 23/2012, FILUM Kragujevac, p. 184-187.

[8] Voir : Ana Vujović, Srpsko-francuska susretanja, Beograd, Učiteljski fakultet, 2011, p. 317-338.

[9] Voir : Jelena Novaković, « La littérature serbe dans la presse française à l’époque de l’entre-deux-guerres », Srbi o Francuzima – Francuzi o Srbima / Les Serbes à propos des Français – les Français à propos des Serbes, éd. Jelena Novaković et Ljubodrag Ristić, Univerzitet u Beogradu - Filološki fakultet, Društvo za kulturnu saradnju Srbija-Francuska, Beograd, 2015, pp. 21-38.

 

Date de publication : octobre 2019

 

DOSSIER SPÉCIAL : Les relations littéraires et culturelles franco-serbes dans le contexte européen

 

Date de publication : juillet 2014

 

> DOSSIER SPÉCIAL : la Grande Guerre
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Le poème titré "Salut à la Serbie", écrit en janvier 1916, fut lu par son auteur Jean Richepin (1849-1926) lors de la manifestation pro-serbe des alliés, organisée le 27 janvier 1916 (jour de la Fête nationale serbe de Saint-Sava), dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne. A cette manifestation assistèrent, â côté de 3000 personnes, Raymond Poincaré et des ambassadeurs et/ou représentants des pays alliés.

Grace à l’amabilité de Mme Sigolène Franchet d’Espèrey-Vujić, propriétaire de l’original manuscrit de ce poème faisant partie de sa collection personnelle, Serbica est en mesure de présenter à ses lecteurs également la photographie de la première page du manuscrit du "Salut à la Serbie".

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